Bernard Russi, fondateur et CEO de BOAS, et Bernard Nicod fêtent cette année les 30 et 40 ans de leurs empires respectifs. Deux personnalités bien distinctes, mais deux références qui ont chacune contribué à redessiner le paysage entrepreneurial romand.

 

 

Ils partagent le même prénom, la même réussite dans les affaires qui a fait du premier le champion vaudois de la promotion immobilière quand le second prospérait dans les centres médicaux et thermaux ainsi que cette fierté en commun d’être partis de rien et s’être forgés à la seule force de la volonté. On serait pourtant tenté de les opposer tant leurs personnalités divergent. Bernard Nicod le flamboyant, volontiers provocateur et habitué à défrayer la chronique, assume avec décontraction ses intuitions comme ses coups d’éclats, quand Bernard Russi cultive la discrétion et s’exprime avec une certaine authenticité, non départie d’humilité. A l’heure de l’anniversaire des groupes BOAS et Bernard Nicod, retour sur ces succès entrepreneuriaux du tournant du siècle.

Le stagiaire devenu roi

 Au salon de l’immobilier de Neuchâtel en 2018 sont réunis sur scène les six «rois» de l’immobilier romand. Aux côtés de Christian Constantin, Bernard Nicod semble prendre plaisir à porter la couronne, même sous le feu des piques acerbes de l’humoriste Thomas Wiesel au jeu duquel il se prête volontiers. Rançon logique d’un succès bâti sur quatre décennies et d’un tempérament de feu, enthousiaste ou emporté, parfois jusqu’à l’excès. Comme pour se remémorer le chemin parcouru, celui qui pèse aujourd’hui plus d’un demi-milliard d’états locatifs aime à rappeler ses tout débuts, notamment son premier poste de stagiaire «à 1400 francs» en 1977, deux ans avant de s’établir à son compte.

 Bernard Nicod évoque avec respect le souvenir de son premier patron, Ferid Nafilyan, «un homme sérieux, de parole, un type génial» qui l’a lancé dans le métier et lui a donné sa chance: «Le directeur des ventes n’était vraiment pas à la hauteur. Je l’ai dit à mon patron et lui ai demandé de me confier un bien à vendre. «Vous faites le malin?» m’a-t-il dit, avant de me mettre au défi sur un appartement particulièrement difficile à placer. J’ai fait venir sept copines, on a appelé la terre entière de 17h à 20h tous les soirs, et bouclé la vente en moins de trois semaines.» Et de conclure, tout sourire: «Rien n’est invendable.»

 Lancée en 1979, la jeune entreprise florissante Bernard Nicod s’étend rapidement sur La Côte et la Riviera, avant de gagner Genève. Un succès pourtant loin d’être écrit, particulièrement sur le marché vaudois du locatif déprimé fin des années 70: «Les trois plus grandes régies se sont réunies, ils ne me donnaient pas six mois, ils disaient que j’allais trop vite. Au final, ce furent des années formidables, on rachetait des bureaux, engageait les collaborateurs à l’oral.»

 Fin des années 80, Bernard Nicod voit venir la crise immobilière: «J’ai senti qu’on allait droit à la catastrophe; je l’ai dit dans la presse, d’ailleurs. J’ai vendu, mais un peu trop tard. A un moment, nous perdions 800 000 francs par mois à cause de la hausse des taux.» Il fait le dos rond et parvient à conserver la confiance de la majorité de ses partenaires bancaires avant de «sortir enfin la tête de l’eau» en 1997, puis de rebondir au tournant des années 2000. Avec 240 salariés et près de 43 000 biens en location, Bernard Nicod s’est imposé sur le marché comme sur la scène médiatique. Souvent controversé, parfois jalousé, il assume ses intuitions les plus fines comme ses dérapages les plus retentissants avec cette même assurance qui l’a conduit au succès.

BOAS, succès au fil de l’eau

 Tandis que Bernard Nicod brûlait les étapes, Bernard Russi prenait son temps. Il faut dire que rien ne prédestinait le natif de Château-d’Œx, fils d’un sous-chef de gare, à la carrière d’homme d’affaires qui l’attendait. Consécutivement chef d’atelier chez Peugeot, puis chauffeur routier, il reprend une station-service puis un garage Mazda au début des années 70. En 1978, il entre dans la gendarmerie où il officiera huit ans. Ce n’est qu’en 1989 qu’il acquiert avec sa future femme Anne son premier EMS, Joli Automne, à Ecublens, et que se dessine la holding qui prendra cinq ans plus tard le nom de BOAS.

 Valoriser l’existant s’inscrit dès lors dans la stratégie menée avec prudence par Bernard Russi, qui reprendra tour à tour la résidence médicalisée La Gottaz ou encore l’EMS L’Eaudine à Montreux au début des années 90, avant Clos Bercher en 1997. Une vague d’acquisitions accélérée dans le domaine des résidences médicalisées qui se poursuivra dans les années 2000.

 Déjà, l’eau est omniprésente. «C’est un élément qui me parle depuis toujours, en tant que passionné de plongée. Dans la plupart de mes EMS, je commençais par installer un aquarium», se rappelle l’actuel patron d’Aquatis qui allait, en 2008, entamer le virage de son groupe vers les centres thermaux avec l’acquisition des Bains de Saillon. Il redessine totalement l’institution. Une démarche rééditée avec la reprise du Centre thermal d’Yverdon, dont l’ambitieux projet de modernisation vient d’être dévoilé en juin 2019.

 Le pivot de BOAS vers le thermal est acté en 2016, avec la revente de la branche EMS: «Trop de contraintes, besoin de liberté», évoque Bernard Russi, dans le fond moins venu aux affaires que les affaires ne sont venues à lui. Besoin peut-être aussi de liquidités plusieurs dizaines de millions engagés pour mener à bien le projet Aquatis, enlisé jusqu’à ce qu’il le reprenne, un peu malgré lui: «Aquatis, c’est presque un accident. Je me suis retrouvé seul, je ne pensais pas gérer le projet complet», admet celui qui s’est malgré tout investi corps et âme dans l’aventure, et poussé la dimension pédagogique et l’engagement pour la sauvegarde d’espèces menacées. En gestionnaire prudent, Bernard Russi admet les risques, mais affiche sa confiance dans la solidité de BOAS: «Le spa médical est un secteur d’avenir. Quant à Aquatis, je suis convaincu qu’il s’affirmera comme un fleuron du groupe.»

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