Depuis 30 ans, ses romans, nouvelles et récits de voyage se sont vendus à plus de 15 millions d’exemplaires. A 64 ans, l’Américain Douglas Kennedy est un formidable écrivain à succès, aussi populaire qu’adulé par les intellectuels. Aujourd’hui, il partage sa vie entre Londres, Paris, Berlin, sa maison dans le Maine, au nord-est des Etats-Unis, et New York, sa ville natale. C’est de là, après une séance de fitness, qu’il a répondu à nos questions avec finesse et drôlerie. Il sera début septembre l’invité vedette du Livre sur les quais à Morges.
ENFANCE
Quelle force en avez-vous tiré?
J’ai grandi entre une mère qui ne m’aimait pas et un père autoritaire. Mais vous connaissez beaucoup d’écrivains qui ont eu une enfance heureuse? L’avantage, c’est qu’à 8 ans, comme une fuite, je fréquentais déjà la bibliothèque de Manhattan et à 12 ans la cinémathèque.
Vous en souffrez encore?
Je ne suis ni amer ni fâché. Le pardon est essentiel dans la vie.
STRESS
Qu’est-ce qui vous stresse?
Quand mes enfants ont des problèmes. Mon fils a 23 ans, ma fille 27. Et comme on dit: petits enfants, petits problèmes, grands enfants, grands problèmes. Nous sommes très proches.
Un petit truc pour vous calmer?
Cela dépend du moment dans la journée. Si c’est le matin, je fais du sport. Et dans le sport comme dans l’écriture, autant je déteste le processus autant j’aime le résultat. Et si c’est le soir, un bon verre de whisky en écoutant du jazz, je suis un grand fan de jazz.
AMOUR
Quelle place prend-il dans votre vie?
J’ai un amour sans limite pour mes enfants. Quant à ma vie intime, je me suis marié deux fois et divorcé deux fois. Mais je reste optimiste tout en état réaliste.
Selon vous, peut-on trouver l’amour sur internet?
Jamais, jamais!
La fidélité est-elle importante?
Au début oui, après moins.
PHYSIQUE
Qu’aimez-vous dans votre physique?
A 64 ans, j’ai toutes mes dents, tous mes cheveux et je n’ai pas de ventre, ce qui est déjà pas mal. Ce qui n’empêche que je n’aime pas me voir en photo. Je suis mal à l’aise avec mon image, comme la plupart des gens.
Que détestez-vous dans votre physique?
A cause d’une maladie d’enfance, je ne marche pas, je rebondis, comme monté sur ressort et c’est très disgracieux.
Acceptez-vous de vieillir?
Non, je refuse. Mais tant qu’on est curieux on reste jeune. La curiosité est essentielle.
La chirurgie esthétique, ça pourrait vous tenter?
Absolument pas.
SAVEURS ET SÉDUCTION
Quel est votre rapport à la nourriture? Du bout des lèvres? Goulûment?
Je suis bio mais pas trop. La vie est trop courte pour s’imposer trop de règles.
Un plat qui vous fait craquer?
Une douzaine d’huîtres accompagnées d’un verre de Chablis.
Un vin où vous pourriez vous noyer?
Un Château Margaux, même si, issu de la classe moyenne, je rechigne à payer une bouteille trop chère. Juste avant ma mort, je rêve d’un Château Margaux et d’un bon paquet de cigarettes, même si j’ai arrêté de fumer.
RELIGION
Etes-vous croyant ?
Je ne crois pas en Dieu, je crois en Jean-Sébastien Bach.
Vous avez prié à un moment de votre vie?
Oui, une seule fois. Quand j’ai découvert mon fils très malade, il avait 5 ans. Mais, en fait, en priant j’ai surtout parlé avec moi-même.
L’ARGENT ET VOUS
Entretenez-vous une relation saine avec l’argent?
Oui, je pense. Je ne suis pas excessivement dépensier, mais je déteste les gens avares.
Votre achat coup de folie?
Je m’offre toujours les meilleures places pour la Philarmonie de Berlin, quel qu’en soit le prix.
VOS NUITS
Sont-elles plus belles que vos jours?
Elles sont courtes car je sors cinq ou six soirs par semaine, pour aller au théâtre, au concert, au cinéma. Près de ma maison dans le Maine, il y a une très bonne cinémathèque.
Qu’est-ce qui peut vous empêcher de dormir?
Un peu tout car je souffre d’insomnie. Quand je me réveille en pleine nuit, j’allume mon ordinateur, j’écris pendant deux heures et en principe, j’arrive à me rendormir.
ET ENCORE …
Entre autres amabilités, vous traitez Trump d’escroc, d’abruti, de raciste. S’il est réélu en 2020, vous quittez l’Amérique?
On verra. L’ Amérique aujourd’hui est divisée en deux pays, les pros et les anti-Trump. Et je crois qu’on est en train d’assister à la fin de l’empire américain au profit de la Chine. Mais, oui, à cet instant, je pense que Trump va regagner. Il n’a qu’une qualité, il me rend nostalgique de George W. Bush.
Vous êtes déjà venu une dizaine de fois en Suisse. Qu’aimez-vous dans notre pays?
C’est un monde à part dans l’Europe, avec ses trois langues, son côté multiculturel. Je trouve les Suisses très cultivés. Et puis, contrairement au cliché, votre pays n’est pas aussi propre qu’on veut bien le dire et cela plaît à mon regard d’écrivain.
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