Avant de faire rire et chanter le public morgien avec son premier one-woman-show, la cantatrice française a ouvert son cœur de grande amoureuse pour Paris Match Suisse.

Pour son premier seule en scène, «Tout est dans la voix», Marianne James a choisi de… ne pas être seule! À chaque représentation, elle embarque tout son public avec elle dans un original et hilarant exercice de chant. Jeudi 13 juin, elle fera sa classe au Théâtre de Beausobre, dans le cadre de la 36e édition de Morges-sous-Rire. Depuis le succès de son spectacle musical «L’Ultima Récital» dans les années 1990, et son passage dans le fauteuil de jurée de «Nouvelle Star», lors des saisons 2 à 5 qui avaient notamment révélé Amel Bent, Christophe Willem et Julien Doré, la chanteuse est une figure incontournable du showbiz. Tour à tour animatrice, actrice et candidate de «Mask Singer», l’ancienne présentatrice de l’Eurovision pour la France se régale depuis 2018 à son poste de jurée de «La France a un incroyable talent».  

Vingt ans après avoir lancé aux téléspectateurs de Nouvelle Star son célèbre «Vous avez de la merde dans les oreilles», la magnifique diva de Montélimar n’a rien perdu de son franc-parler si attachant. Interview.

 

En tant qu’experte de la voix et de la scène, qu’avez-vous pensé de la victoire de Nemo pour la Suisse à l’Eurovision et de la prestation de Slimane pour la France?

J’ai trouvé la prestation de Slimane unique et puissante, presque désespérée. Trop peut-être? Quant à Nemo, c’est la chanson elle-même qui est très «Eurovisienne»! Sa victoire était logique.

Avec votre one-woman-show, vous renouez un peu avec votre ancien métier: professeur de chant. Comment se déroule cette masterclass?

Quand j’arrive sur scène, je considère que je suis face à la chorale que je mène avec maestria depuis un an et notre concert est dans deux jours. Les spectateurs se regardent avec des yeux comme des soucoupes, car ils ne savent pas de quoi je parle. Je leur dis: «Ok, alors on va tout reprendre depuis le début!» Et le début, c’est il y a 4 millions d’années, avec les australopithèques et leurs borborygmes.

Pourquoi remonter si loin pour apprendre à chanter?

Parce que quelque chose d’essentiel s’est passé à ce moment-là: l’humain s’est mis debout. Sa structure osseuse a changé, son corps a évolué, le pharynx et le larynx se sont créés et de grandes zones de vibrations se sont ouvertes.

Quelle expérience vos «élèves» vont-ils vivre?

Ils vont apprendre énormément de choses sur eux, découvrir leur voix. Ils auront des crampes le lendemain d’avoir tellement ri et d’avoir travaillé leur souffle. Mais il ne faut pas que les gens aient peur de venir: je ne prends jamais ceux qui ne veulent pas participer.

Qu’est-ce qui a motivé l’écriture de ce spectacle humoristique sur le chant?

L’arrivée à l’âge de la transmission. Je vois toujours des gens se poser des questions sur la voix, la justesse, mais ils sont souvent à côté de la plaque. Quand vous jouez du saxophone, vous entretenez votre instrument. Quand vous chantez, vous êtes à la fois l’instrumentiste, l’instrument et l’étui qui le protège. J’ai eu envie d’expliquer comment jouer de sa voix. Je voulais également parler de quelque chose qui me fait beaucoup de bien. Chanter, ça vaut une séance de rires, un restaurant, des antidépresseurs,… On ne se rend pas compte à quel point le chant ou le fait de chanter avec les autres vous approche du bonheur.

Dans la vie de tous les jours, avec qui chantez-vous principalement?

Je chante tous les soirs avec ma maman devant la formidable émission de Nagui, «N’oubliez pas les paroles». Elle a 88 ans et vit chez moi désormais. Elle est atteinte de la maladie d’Alzheimer. Quand on chante, sa mémoire revient et, à ce moment-là, j’ai de nouveau une maman très vivante. On chante aussi des choses de son époque. Les paroles apprises avec de la musique sont archivées dans une partie du cerveau qui n’est pas attaquée par la maladie. Un Alzheimer, vous lui chantez des chansons de ses 20 ans, il a de nouveau les lèvres qui bougent, il va repartir.

Quelle place occupait la musique à la maison lorsque vous étiez enfant?

Maman a toujours aimé chanter. Elle avait d’ailleurs un groupe dans sa jeunesse. Elle chantait Dalida, Gloria Lasso, Edith Piaf,… Mon père ne chantait pas, mais mon grand-père paternel était pâtissier et ténor de rue. Il chantait tout Luis Mariano, sur le trottoir, devant sa pâtisserie. Donc ça leur a semblé normal, quand à 13-14 ans, j’ai commencé à chanter comme un pinson, du jazz, du classique, tout ce qui me passait sous l’oreille.

À quel moment avez-vous décidé d’en faire votre métier?

À 16-17 ans. Alors j’ai vite passé mon bac et je suis montée à Paris.

Avant cela, vous aviez envisagé un avenir très différent, dans les ordres.

Oui! Quand, j’ai fait ma seconde communion, j’ai suivi les derniers jours d’une sœur, une ursuline, atteinte d’un cancer. Pendant un mois, je suis allée lui rendre visite pour qu’elle me parle de son sacerdoce. Je n’ai pas eu peur de tout ce qu’elle m’a dit. Elle m’a expliqué comment Dieu l’avait appelée. Et moi, je me sentais appelée aussi.

Et aujourd’hui?

Je me sens toujours appelée. Je crois toujours. Je suis très amoureuse de Jésus depuis toujours. Pour moi, il a été l’homme idéal. Je n’ai jamais été déçue par lui. Évidemment, si on doit le comparer avec nous, humains, il n’y a pas photo, on ne peut pas lutter. C’est facile de dire qu’on aime Jésus et qu’on n’a pas été déçue par lui parce que c’est une vue de l’esprit. Ce qui est sûr, c’est que l’amour humain, il est limité pour les grandes amoureuses comme moi.

En quoi êtes-vous une grande amoureuse?

L’amour a été si important pour moi que peu d’hommes ont su tenir le choc d’une telle demande, pour ne pas dire exigence! L’amour que l’on porte à Jésus peut être gigantesque. Lui, ne s’en plaindra pas, n’en souffrira jamais. Alors qu’un simple homme aura peur d’un tel amour! C’est pour ça que les gens sont si amoureux de leur chien, de leur chat et qu’ils sont si malheureux quand ils partent: il n’y a pas non plus de limite à l’amour pour un animal. Tu peux être chiant avec lui, il t’aimera toujours. Avec un humain, tu ne peux pas parce que tu l’étouffes. Un chien, tu peux aussi lui dire ce que tu n’oserais pas dire à des humains, tu peux être totalement toi. Je veux avoir un toutou bientôt, mais j’attends un peu, car là je tourne trop. Je le prendrai à la SPA.

Quel est le conseil que vos parents vous donnaient, enfant, qui vous accompagne encore aujourd’hui?

«Cela ne sert à rien d’avoir peur. Essaie et tu verras bien!» Ils me disaient de vivre mes ambitions, car il vaut mieux essayer que regretter. Et tant pis si au passage, notre orgueil est froissé. C’est ce qui fait que, dans la vie, on avance. Ceux qui n’osent pas, les timides, sont, selon moi, de gros orgueilleux. Ils ont peur de se soumettre à la critique, ils se demandent sans cesse ce qu’on pourrait dire d’eux.

Vous ne ressentez jamais de peur ou de timidité?

Si, mais quand c’est le cas, je n’aime pas ce que je fais. Si j’ai trop peur quand je rode un spectacle, je me trouve mauvaise, je me mettrais des claques, je ne suis pas assez la Marianne qu’on attend. J’aime bien être cette femme un peu too much. Cela ne veut pas dire que je n’ai pas des fragilités ou que je ne doute pas. Mais la peur est mauvaise conseillère. Je pense par exemple que si les gens sont si haineux sur les réseaux sociaux, c’est parce qu’ils sont portés par la peur. Le haineux est souvent le peureux.

De quoi doutez-vous?

De mon talent, parfois. Il m’arrive aussi de douter d’avoir trouvé les bons mots pour arranger une situation difficile. L’année dernière, j’ai vu une maman mettre une raclée à sa fillette. La mère avait les yeux pleins de larmes, elle était à bout. Je l’ai invitée à boire un verre, on a discuté. J’interviens toujours dans ce genre de situation. Mais il m’est arrivé de prendre des coups. Comme cette fois dans le métro où une dame âgée voulait actionner le frein d’urgence parce qu’un garçon de 20 ans n’arrêtait pas de l’emmerder. J’ai essayé de maîtriser le garçon et d’empêcher la dame de tirer le frein. Elle m’a mis un coup de poing.

Et le trac, c’est quelque chose que vous ressentez?

Très peu avec ce spectacle-là, parce que je suis très sûre de moi. J’entre sur scène très naturellement, c’est la meilleure chose que je puisse offrir aux spectateurs. Ils sont contents de me voir et moi aussi. Tout se fait simplement. Ils me reniflent, je les renifle. Et j’en vois qui sont surpris de voir une dame aussi grande. Et aussi ronde!

Vous avez souvent évoqué votre long combat contre vos kilos.

Oui. J’ai fait dix régimes dans ma vie. En tout, j’ai perdu 130 kilos, presque l’équivalent de mon poids actuel! Vous ne pouvez pas savoir à quel point je regrette d’avoir commencé les régimes. J’avais 14 ans, je pesais 70 kilos pour 1m80. Je faisais beaucoup de sport, de la boxe française, de l’athlétisme. Je me trouvais grosse. C’était stupide parce que je me comparais à mes copines qui pesaient 10-20 kilos de moins. Sauf qu’elles mesuraient 1m60! J’ai suivi le régime Montignac et je suis tombée à 63 kilos. Dès que j’ai arrêté, je suis montée à 73-74. J’ai voulu remaigrir, mais je suis descendue moins bas, à 67 kilos. Puis je suis remontée à 80. J’ai flippé. Je suis redescendue à 70, remontée à 85, redescendue à 75, remontée à presque 100. Là, j’ai fait une dépression et je suis descendue à 90 kilos, avant de remonter à 107, etc. Le yoyo, je l’ai fait toute ma vie.

Vous faites encore des régimes?

Non. Il ne faut pas faire de régime, il faut changer d’hygiène de vie. Aujourd’hui, j’ai une très belle hygiène de vie. C’est important parce qu’il faut que je sois en forme pour jouer mon spectacle. J’ai la chance de ne pas avoir de triglycérides, de diabète ou de cholestérol. Mais mon docteur aimerait que je perde 40 kilos.

Vous avez fait la paix avec votre corps?

Oui. Tout le monde me trouve d’ailleurs bien dans ma peau. C’est vachement important d’être bien dans sa peau! J’aurais pu aller voir un chirurgien pour enlever mon ventre. Mais c’est mon ventre à moi! Sur scène, je l’attrape, je le fais vibrer, je montre comment je respire avec. Mon corps, je veux aussi le remercier parce que tout ce gras fait que j’ai encore la voix de mes 20 ans. Il me rend aussi insubmersible, parce que le gras flotte. Et je n’ai pas de rides sur le visage. Il y a quand même de petits avantages à l’obésité! (Rires). Aujourd’hui, j’assume totalement mes kilos. Aussi parce que je n’ai pas vraiment le choix: ils sont très visibles. On voit mon addiction à la nourriture à la taille de mon ventre et de mes fesses très généreuses.

Comment se manifeste cette addiction?

Je ne grignote jamais entre les repas. Mais quand je suis à table, je mange comme trois. Ce qui me sauve et qui fait que je ne suis pas plus grosse, c’est que je n’aime pas le sucre. Pourtant, je suis fille de nougatier!

À quelques jours de votre spectacle à Morges, avez-vous un souvenir particulier de vos passages en Suisse romande à partager?

J’y suis toujours très bien reçue, j’y ai toujours bien mangé, j’apprécie le calme, le luxe et la volupté. Je suis aussi très pote avec Joseph Gorgoni, on avait le même producteur. Il m’est déjà arrivé de dormir chez lui, à Genève. Cela fait quelques années qu’on ne s’est pas vus, mais je l’aime vraiment beaucoup et je crois qu’il m’aime beaucoup aussi. On s’est beaucoup inspiré l’un l’autre.

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