Couronnée de succès dans le cinéma et les séries françaises, la Valaisanne Noémie Schmidt est toujours autant attachée à son Valais natal où elle revient très souvent. Cet été, elle jouera Antigone de Sophocle sur l’esplanade du Crochetan à Monthey. Des retrouvailles dont elle se réjouit beaucoup.

À 31 ans, Noémie Schmidt est aujourd’hui l’actrice suisse la plus connue au niveau international. Elle a joué aussi bien dans des comédies à succès comme «Radin!» avec Dany Boon que dans des films plus indépendants. Connue pour son tempérament indépendant, curieux, idéaliste, elle partage sa vie entre Paris et une ferme en Dordogne, où elle n’hésite pas à manier les outils. Ce qui lui permet, comme elle dit «de se décloisonner». À 18 ans, elle était partie seule sillonner les États-Unis à vélo. Aujourd’hui, toujours aussi avide d’expériences nouvelles et de découvertes, elle écrit, fait de la photo, en plus de la scène.

Vous êtes connue pour être passionnée, idéaliste, rebelle. Comment vivez-vous ce qui se passe en Ukraine?

Je ne peux dire que ce pense tout le monde. Je suis bouleversée. Cela me dépasse.

Cet été, vous allez jouer Antigone à Monthey dont l’histoire fait écho à la tragédie actuelle.

Oui, c’est l’histoire de Créon un tyran qui n’écoute pas son peuple. Antigone sa nièce s’élève contre ce pouvoir, subit les foudres de son oncle puis est condamnée à mort. Écrite lors de la Grèce antique, il y a si longtemps, cette pièce reste plus que jamais universelle. «Je ne suis pas née pour partager la haine, je suis née pour partager l’amour», j’adore cette phrase d’Antigone. On doit s’en rappeler dans le contexte actuel.

Jouer dans votre canton d’origine, ça doit être particulier pour vous?

La première fois que j’avais joué en Valais, c’était dans «Faust», j’avais 13 ans. C’est génial de revenir. Je suis entourée de comédiens formidables, généreux. Et dans le chœur, il y aura ma maman qui chante. Ça va être plein d’émotions.

Vous restez très attachée au Valais?

Le Valais, c’est mon cœur, mon cocon. J’y retourne très souvent, j’y ai mes repères, ma famille, des amis. C’est un canton hypervivant, beau, convivial. Et je suis très fière de tenir une chronique mensuelle dans «Le Nouvelliste» où j’ai carte blanche, une totale liberté de ton.

En 2012, voilà pile dix ans, vous jouiez dans «Coda», votre premier film. Aujourd’hui vous êtes l’actrice suisse la plus connue sur le plan international. «J’ai eu une chance de dingue», avez-vous dit un jour.

Oui, j’ai la chance extraordinaire de partager ma vie avec des artistes, de toujours travailler en équipe. Et puis aujourd’hui, en plus, j’écris, je fais de la photo.

On connaît les clichés qui circulent sur les Suisses en France et particulièrement à Paris. Vous n’en avez jamais souffert?

Honnêtement, je m’en fous. J’essaie d’être très détachée à l’égard de ce que les gens peuvent penser de moi. La Suisse est un pays riche, nous sommes privilégiés, je ne vois pas pourquoi on pourrait souffrir d’être Suisse. Quand on est une femme, on souffre d’autres discriminations.

En 2020, vous aviez soutenu Adèle Haenel qui aux Césars avait quitté la salle pour dénoncer le triomphe de Polanski, accusé de viols. C’est un combat qui vous tient à cœur?

La situation s’améliore, mais l’égalité est loin d’être atteinte. Ça prend du temps, il faut continuer à se battre. Je suis en lutte contre toutes les inégalités, car je pense qu’aucun être humain ne vaut mieux qu’un autre. Je me bats pour une société plus inclusive, plus tolérante.

Vous avez joué aussi bien dans des comédies populaires comme «Radin!» avec Dany Boon que dans des films plus indépendants comme le récent «Années 20» tourné en un seul plan séquence dont vous êtes la coscénariste. Vous aimez varier les plaisirs?

Le monde est immense. Il y a tellement de choses à découvrir. Alors oui, j’aime me diversifier.

Curieuse, indépendante, vous avez déclaré un jour: «Je ne suis pas narcissique». Vous détonnez un peu dans le milieu?

Pas seulement dans le milieu, dans la vie en général, j’aime ce qui est farfelu, différent, transgressif. La société nous impose des normes et je ne suis pas dans la norme.

Côté glamour, vous avez pourtant été l’égérie du célèbre parfum «Mademoiselle Rochas».

Une belle expérience mais qui m’a surtout permis, matériellement, de m’offrir une ferme en Dordogne, ce dont je rêvais.

Précisément, vous partagez votre vie entre Paris et cette ferme à la campagne. Vous en avez besoin pour votre équilibre ?

À la ferme, je manie les outils; on partage des grandes bouffes, des grandes discussions avec des amis qui vivent avec moi. À Paris, on fréquente toujours un peu les mêmes personnes et on peut perdre pied à la longue. Dans cette ferme, je me ressource, je me décloisonne. J’aime beaucoup fréquenter les gens qui vivent sur place et qui pensent autrement. J’élargis mon champ de connaissances. De manière générale, j’adore discuter avec les chauffeurs de taxi, les gens dans les gares, dans le métro. On découvre un regard sur les réalités qu’on n’a pas si on n’ouvre pas la discussion. La société est ainsi faite qu’on ne parle souvent qu’à des gens qui nous ressemblent.

À 12 ans, vous étiez déjà sur les planches. Jouer était une vocation?

J’ai toujours eu le théâtre en moi. J’ai toujours aimé jouer, créer. La vie est un grand jeu.

À 18 ans, matu en poche, vous être partie seule sillonner les États-Unis à vélo pendant huit mois. Pourquoi?

J’avais envie de découvrir de nouveaux espaces, des cultures différentes, de respirer un autre monde. N’avoir pour bagage que mon sac à dos m’offrait une liberté totale. Je pouvais tourner à gauche à droite en suivant mes seules envies. Au total, avec le train et le bus, j’ai traversé 25 États.

«Je suis contente de vieillir», avez-vous déclaré un jour. Vous confirmez?

Plus les années passent, plus je me détache de ce qui est futile. Je me rapproche de moi-même, j’ai plus confiance en moi, même si intérieurement, je reste l’enfant émerveillé que j’ai toujours été.

Quels sont vos projets?

En ce moment, je tourne une série intitulée «36 15 Monique» qui raconte la naissance dans les années 80 du minitel rose, l’ancêtre des messageries érotiques. Je joue Stéphanie Roussel, qui avait déposé la première licence. C’est très amusant. Et, à partir du 27 avril, je vais sillonner la France pour présenter «Années 20» ce film auquel je tiens tant et qui raconte Paris à l’heure du déconfinement en une seule prise d’une heure et demie. On l’a tourné et cofinancé avec des amis, avec qui je suis en colocation à Paris. Une expérience unique, une belle histoire d’amitié. Le film, et j’en suis fière, a d’ailleurs été récompensé au Tribeca Festival de New York confonde par Robert de Niro. Malheureusement, nous n’avons encore pas trouvé un distributeur en Suisse.

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